Les réactions nucléaires  
     
   
     
  Le modèle du noyau composé  
     
 
L'introduction du modèle du noyau composé date de 1935 et repose sur la fameuse image utilisée par Niels Bohr : " Les nucléons qui composent le noyau sont maintenus dans un puits de potentiel, comme des billes aux creux d'un cendrier. Quand une nouvelle bille entre dans le cendrier, elle subit de multiples collisions et ne peut s'échapper que difficilement ".
 
     
 
 
Cette vision revient à considérer que les forces nucléaires sont si fortes que lors d'une réaction entre un projectile et un noyau, le projectile est capturé et ne peut s'échapper avant d'avoir partagé sont énergie avec les nucléons constituant le noyau. Cette conception implique que le noyau composé (projectile+cible) oublie complètement la façon dont il a été formé. Plus précisément, la formation et la désexcitation du noyau composé sont deux processus indépendants. En d'autre termes, la désexcitation du noyau composé dépend uniquement de ses caractéristiques intrinsèques (énergie, moment angulaire, parité).
 
Vue artistique du processus de formation et décroissance d'un noyau composé. Le noyau composé émet successivement un photon, un neutron (noir) et un proton (rouge). Les oscillations du noyau menant à une situation d'équilibre précèdent les émissions illustrant l'hypothèse d'indépendence entre la formation et la décroissance du noyau composé.
 
 
     
 
Cette propriété est particulièrement intéressante puisqu'elle permet de calculer les sections efficaces des différentes voies de réactions ouvertes à l'aide de considérations purement statistiques. Deux approches sont possibles. La première, développée dans les années 40 par Weisskopf et Ewing ne prend pas en compte la conservation du moment angulaire. Elle ne permet donc pas de décrire les sections efficaces de réaction vers des niveaux discrets et ne peut pas non plus permettre de calculer des distributions angulaires. On lui préfère donc la théorie de Hauser et Feshbach, développée en 1952, qui pallie les manques de la théorie de Weisskopf-Ewing.
 
     
 
Quelle que soit la théorie utilisée, l'hypothèse d'indépendance entre la formation du noyau composé et sa désexcitation permet d'écrire la section efficace de réaction comme le produit de la section efficace de formation du noyau composé par sa probabilité de décroissance dans une voie de sortie donnée. Les deux termes peuvent être exprimés en fonction de coefficients fournis par le modèle optique appelés coefficients de transmission. Lorsque l'on décompose l'onde associée à un projectile en une superposition d'ondes partielles, les coefficients de transmission représentent la fraction de chacune des ondes partielles absorbée par le noyau. Bien sûr, on peut aussi voir ces coefficients comme la fraction émise par le noyau ce qui permet alors de traiter la désexcitation du noyau composé. On comprend donc bien que non seulement il faut disposer d'un potentiel optique pour décrire l'interaction entre le projectile et la cible, mais aussi de potentiels optiques pour décrire les émissions de particules légères à partir du noyau composé.
 
     
 
Notons enfin que l'hypothèse d'indépendance entre la formation et la décroissance du noyau composé, si elle est pratique, n'est qu'une approximation. Il a été démontré qu'il est nécessaire de corriger la théorie d'Hauser-Feshbach pour prendre en compte ce que l'on nomme les corrections dues aux fluctuations des largeurs de voies. Ces corrections ont pour effet principal d'augmenter la section efficace de réaction élastique au détriment des voies inélastiques. Elles ont le bon goût de se calculer, elles aussi, à partir des coefficients de transmission même si ce calcul peut parfois se révéler fastidieux.
 
     
 
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