La Direction des applications militaires (DAM) du CEA a étudié
les lasers dès 1960 (invention du laser en 1957). Acquérant
plus de 30 années d’expériences dans le
domaine des lasers de puissance, et pionnière des premières
expériences générant des réactions
de fusion par laser en 1969.
Avec la réalisation du programme Simulation,
la DAM a prévu l''installation de 2 nouveaux
lasers sur le site du Cesta, près de Bordeaux : la Ligne
d'Intégration Laser (LIL) mise en service en 2002, et
le laser Mégajoule (LMJ), dont la réalisation doit être
achevée au début de la prochaine décennie.
L'impact des faisceaux laser intenses sur une cible provoque
le chauffage rapide d'une petite quantité de matière
qui est portée à l'état de plasma. Selon les conditions
expérimentales retenues et la zone de plasma considérée,
la densité peut varier entre quelques millièmes
et quelques centaines de g/cm3, et la température
entre quelques centaines de milliers et quelques
centaines de millions de degrés. Ces conditions
thermodynamiques extrêmes provoquent dans le plasma
l'émission d'une très importante quantité de photons
et d'électrons dont l'énergie varie entre quelques
dizaines d'eV et quelques dizaines de keV.
Ces particules possèdent une énergie suffisante pour interagir
avec les noyaux des ions partiellement ou totalement ionisés
présents dans le plasma, entraînant une modification de l'environnement
électronique. Cela agit sur le couplage atome-noyau, et perturbe
les processus nucléaires mettant en jeu des particules chargées,
en particulier les électrons.
Excitation et désexcitation des noyaux dans un plasma
Les processus nucléaires les plus fréquents dans un plasma sont
l'excitation et la désexcitation des niveaux d'énergie des
noyaux. Ils mettent en jeu les particules présentes dans le
plasma : les photons et les électrons. Pour chaque processus
d'excitation, il existe un processus inverse de désexcitation.
Les taux de ces deux processus se compensent exactement quand
le plasma est à l'équilibre thermodynamique avec les noyaux.
Le processus d'excitation
nucléaire radiatif est l'absorption
résonante d'un photon. Le noyau s'excite en absorbant
un photon ayant l'énergie de la transition nucléaire.
Ce phénomène se produit en quantité significative dès
que l'énergie thermique du plasma est de l'ordre
de grandeur de l'énergie de la transition nucléaire.
Il est en concurrence avec deux processus de désexcitation.
L'émission spontanée d'un photon par le noyau a lieu
de la même façon qu'en laboratoire où elle est couramment
observée. L'émission induite devient possible, et même
supérieure à l'émission spontanée dès que l'énergie
thermique du plasma atteint l'ordre de grandeur de l'énergie
de la transition nucléaire.
Il existe
trois processus différents d'excitation selon que l'électron est libre ou lié à l'atome
avant et après l'excitation du noyau :
Le processus d’excitation libre-libre
est la diffusion inélastique d’électrons.
Un électron libre s’approche du noyau
et lui fournit une partie de son énergie
cinétique par excitation coulombienne en
échangeant un photon virtuel. Ce phénomène
est important à haute température,
quand les atomes du plasma sont fortement ionisés.
Le processus de désexcitation correspondant
est la diffusion super-élastique d’électrons.
Le processus d’excitation libre-lié
est aussi connu sous le sigle NEEC (Nuclear Excitation
by Electron Capture). Un électron libre
est capturé sur une couche atomique non
pleine et l’excédent d’énergie
est utilisé par le noyau pour s’exciter.
Ce processus n’a pas encore été
observé en laboratoire. Sa mise en évidence
fait l’objet d’un programme expérimental
au GANIL sur un faisceau de fer 57 totalement
ionisé. Le phénomène inverse
est la désexcitation par conversion interne,
connue depuis les années 1930, au cours
de laquelle un noyau se désexcite en cédant
son énergie à un électron
du cortège atomique qui est libéré.
Excitation nucléaire par capture électronique (NEEC)
Le processus d'excitation lié-lié est aussi connu sous le sigle
NEET (Nuclear Excitation by Electron Transition). Un électron d'une couche atomique peu
liée effectue une transition vers une couche plus profonde et l'énergie cédée est utilisée
par le noyau pour s'exciter. Le phénomène inverse est connu sous le sigle BIC (Bound Internal
Conversion). Ce processus ne peut se produire que lorsque l'énergie de la transition atomique
est très proche de celle de la transition nucléaire. Cela limite de façon drastique le nombre
de noyaux pour lesquels l'excitation NEET est possible. En laboratoire, il n'a été observé
sans ambiguïté que sur les noyaux d'or 197 et d'osmium 189 par des équipes japonaises. Dans
un plasma, cette condition est moins draconienne, car l'énergie de la transition électronique
évolue avec les conditions thermodynamiques. L'observation en plasma de ce processus dans
l'uranium 235 fait l'objet d'un programme expérimental auprès des lasers de puissance du CEA.
Excitation nucléaire par transition électronique (NEET)
Différents modèles permettent d'évaluer les taux d'excitation
par ces processus électro-photoniques. Dans le cas de l'excitation
de l'isomère du 201Hg, ces taux ont été calculés dans
un plasma à l'équilibre thermodynamique en fonction de la
température et sont donnés sur la figure ci-contre.