La fission  
     
   
     
  Calcul de sections efficaces de fission  
     
 
Lorsque l'on cherche à calculer la section efficace de fission induite par un projectile sur une cible, on enchaîne plusieurs modèles de réactions nucléaires, décrivant des processus rapides, intermédiaires et lents. Contrairement aux autres voies de réactions classiques, la fission résulte d'une évolution lente du noyau jusqu'à une déformation telle qu'il se scinde en deux. De ce fait, la section efficace de fission est obtenue exclusivement par le processus lent du modèle du noyau composé.
 
     
 
Dès lors, des coefficients de transmission doivent être calculés pour les voies de fission, au même titre que des coefficients de transmission sont définis pour les voies de réactions classiques. Comme on l'a vu dans l' approche théorique, le chemin vers la fission rencontre des obstacles (barrières) qui peuvent être traversés par effet tunnel. Les coefficients de transmission représentent donc la probabilité de traverser ces barrières.
 
     
 
Le calcul de cette probabilité est relativement simple pour une seule barrière, mais devient plus complexe quand plusieurs barrières doivent être traversées. En effet, l'existence de barrières multiples implique l'apparition de puits entre ces dernières. Or, la présence de puits de potentiel entraine l'existence d'états dans ce puits, généralement appelés états de classe II, voire de classe III dans le cas de trois barrières. De tels états ont été observés expérimentalement et provoquent un effet résonant pour le processus de fission, comme l'illustre la figure ci-contre.
 
Etats de classe II et résonances : les états de classe II sont indiqués par les lignes horizontales. Ils induisent des structures résonantes dans la probabilité de fission. Leur largeur augmente avec l'énergie d'excitation, et les pics de résonances sont de ce fait eux aussi élargis.
 
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Cet effet résonnant doit être pris en compte dans le calcul des sections efficaces de fission car il peut modifier sensiblement le coefficient de transmission de fission lorsque l'énergie du système fissionnant est du même ordre de grandeur que celle des états de classe II ou III.
 
     
  La fission de seconde chance et au-delà  
     
 
Mais la complexité ne s'arrête pas à ce stade. En effet, lorsque l'énergie du projectile est suffisament élevée, le noyau composé peut émettre des particules, et c'est alors le noyau résiduel produit qui peut fissionner. Si le noyau composé initial émet un unique neutron, on parle alors d'une fission de seconde chance. Dans de telles conditions, la section efficace de fission résulte de la somme des sections efficaces de fission de tous les noyaux résiduels pouvant être obtenus après émission de particules légères. Plus l'énergie du projectile est élevée, plus le nombre de noyaux susceptibles de fissionner va être important et donc le nombre de paramètres à ajuster élevé.
 
     
 
 
A titre d'illustration, pour un neutron incident de 20 MeV sur l'uranium 238, il faut connaître non seulement les paramètres de fission de l'uranium 239 jusqu'à l'uranium 235 (fissions dite de première chance, seconde, troisième, quatrième et cinquième chance) mais aussi les paramètres de fission correspondant aux autres voies énergétiquement ouvertes; pour une telle énergie incidente; à savoir les voies (n,p), (n,np), (n,d), ... L'ouverture de telles voies de réaction implique donc de disposer des paramètres de fission pour les isotopes du protactinium (crées par l'émission d'un proton) et pour les isotopes du Thorium (crées par émission d'α).
 
Section efficace de fission pour l'uranium 238 en fonction de l'energie du neutron incident. Les noyaux qu'il est nécessaire de prendre en compte sont indiqués en rouge et la voie de décroissance qui amène à ces noyaux est indiquée en vert.
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La notion de chances de fission, si elle complique l'évaluation à haute énergie offre néanmoins un moyen de contrôle de la cohérence d'ensemble des paramètres de fission. En effet, lorsque l'on cherche à décrire la fission de l'uranium 238, les paramètres décrivant la fission de deuxième chance (réaction (n,nf) ) doivent permettre de décrire aussi la fission de première chance de l'uranium 237.
 
     
 
 
De la même manière, la fission de troisième chance de l'uranium 238 doit correspondre avec la fission de seconde chance de l'uranium 237 ou encore de première chance de l'uranium 236. Et la fission de seconde chance de l'uranium 236 doit être cohérente avec la fission de première chance de l'uranium 235, mais aussi la quatrième chance de l'uranium 238. On peut aussi voir la fission de deuxième chance de l'uranium 238 en cohérence avec la photofission (fission induite par des photons) de l'uranium 238. Cette situation est illustrée sur la figure ci-contre où l'on voit que le même jeux de paramètres que ceux utilisés dans le cas présenté sur la figure précédente permet de bien décrire la photofission de l'uranium 238.
 
Section efficace de fission pour l'uranium 238 en fonction de l'energie du photon incident.
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On comprend donc bien que la modélisation de la fission d'un noyau doit se faire en étudiant simultanément les noyaux voisins, ce qui implique bien évidemment un travail considérable mais permet aussi de disposer de données expérimentales supplémentaires pour ajuster au mieux les divers paramètres de fission.
 
     
 
  Consultez les expériences associées : la fission à Los Alamos